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Dans cette vidéo Sraddhalu commence par rappeler la nécessité de protéger l'enseignement et la pratique et enclenche sur une importante clarification à propos de ce passage de l'Agenda du 19 mai 1959 :

"Et je me suis rendue compte que pour cette sâdhanâ du corps, le mantra est essentiel. Sri Aurobindo n’en donnait pas ; il disait que l’on devait pouvoir faire tout le travail sans avoir besoin de recourir à des moyens extérieurs. S’il en était arrivé là où nous en sommes maintenant, il aurait vu que la méthode purement psychologique est insuffisante, et qu’il faut faire un japa [3] parce que seul le japa a une action directe sur le corps. Alors j’ai dû trouver toute seule la méthode, trouver seule mon mantra. Mais maintenant que les choses sont au point, j’ai fait en quelques mois dix ans de travail."

Alors Sraddhalu met en garde contre les compilations et lorsque nous utilisons une citation, à la remettre dans le contexte et à lire le texte en intégralité. Or, effectivement, dans cet Agenda montre bien les différentes étapes à prendre en compte. D'abord il y a le le chemin ascendant, et puis le chemin de la descente jusqu'au mental et au vital, et ensuite, le travail de transformation au niveau du corps, et c'est seulement là qu'intervient la nécessité du japa.

Voyons le texte dans son intégralité.

Quand on est sur le chemin qui monte, le travail est relativement facile. J’avais déjà parcouru ce chemin au début du siècle et établi une relation constante avec le Suprême, avec Ça qui est au-delà du Personnel et des dieux et de toutes les expressions extérieures du Divin, mais aussi au-delà de l’Impersonnel Absolu. C’est quelque chose dont on ne peut pas parler: il faut en avoir l’expérience. Et c’est ça qu’il faut faire descendre dans la Matière. C’est le chemin qui descend, celui que j’ai commencé avec Sri Aurobindo ; et là le travail est immense.

Jusqu’au mental et au vital, on peut encore arriver à faire descendre (et pourtant déjà au mental, Sri Aurobindo disait qu’il y faudrait des milliers de vies, à moins de pratiquer un parfait surrender. [1] Avec Sri Aurobindo, nous sommes descendus au-dessous de la Matière, jusque dans le Subconscient et même dans l’Inconscient.

Mais après la descente, vient la transformation, et quand on en arrive au corps, quand on veut le faire avancer d’un pas – oh! pas même un pas : un petit pas –, tout s’accroche : c’est comme si on mettait le pied sur une fourmilière... Et pourtant la présence, l’aide de la Mère suprême est là constamment ; alors on se rend compte que pour les hommes ordinaires, pareil travail est impossible, ou qu’il y faudrait des millions de vies, et qu’à vrai dire, à moins qu’on ne fasse le travail pour eux et la sâdhanâ du corps pour toute la conscience terrestre, ils ne parviendront jamais à la transformation physique, ou à une échéance si lointaine qu’il vaut mieux ne pas en parler. Mais s’ils s’ouvrent, s’ils s’abandonnent dans un «surrender» intégral, on peut faire le travail pour eux : ils n’ont qu’à laisser faire.

Le chemin est difficile. Et pourtant ce corps est plein de bonne volonté ; il est plein de psychique dans chacune de ses cellules ; il est comme un enfant. L’autre jour, tout spontanément il s’est écrié : «O mon Doux Seigneur, donne-moi le temps de Te réaliser !» Il ne demandait pas que cela aille plus vite, il ne demandait pas à être allégé de son travail: il demandait seulement le temps de faire le travail. «Donne-moi le temps !»

Et ce travail du corps, j’aurais pu le commencer il y a trente ans, mais j’étais prise tout le temps par cette vie harassante de l’Ashram. Il a fallu cette maladie [2] pour que je puisse vraiment me mettre à la sâdhanâ du corps. On ne peut pas dire que j’aie perdu trente années, car il est probable qu’il y a trente ans, si je l’avais pu, ce travail aurait été prématuré. Il fallait que la conscience des autres aussi se développe – les deux progrès sont liés, le progrès individuel et le progrès collectif, on ne peut pas avancer si l’autre n’avance pas.

Et je me suis rendue compte que pour cette sâdhanâ du corps, le mantra est essentiel. Sri Aurobindo n’en donnait pas; il disait que l’on devait pouvoir faire tout le travail sans avoir besoin de recourir à des moyens extérieurs. S’il en était arrivé là où nous en sommes maintenant, il aurait vu que la méthode purement psychologique est insuffisante, et qu’il faut faire un japa [3] parce que seul le japa a une action directe sur le corps. Alors j’ai dû trouver toute seule la méthode, trouver seule mon mantra. Mais maintenant que les choses sont au point, j’ai fait en quelques mois dix ans de travail. C’est cela la difficulté, il faut le temps, le temps...

Et mon mantra, je le répète constamment, quand je suis éveillée et même quand je dors. Je le dis quand je fais ma toilette, quand je mange, quand je travaille, quand je parle aux autres ; c’est là, par-derrière, à l’arrière-plan, tout le temps, tout le temps.

D’ailleurs, on voit tout de suite la différence entre ceux qui ont un mantra et ceux qui n’en ont pas. Chez ceux qui n’ont pas de mantra, même s’ils ont une grande habitude de la méditation ou de la concentration, cela reste comme flou autour d’eux, quelque chose de vague. Tandis que le japa donne à ceux qui le pratiquent une sorte de précision, de solidité : une armature. Ils sont comme galvanisés.

1. Surrender : abdication, soumission.

2. Fin 1958, quand Mère a mis fin aux Entretiens du Terrain de Jeu et n’est plus sortie qu’exceptionnellement de l’Ashram.

3. Japa: répétition systématique et plus ou moins continue d’un mantra.

🌸

Sraddhalu insiste par ailleurs sur le fait que le plus important pour nous est de nous ouvrir à l'Influence de la Mère, de Sri Aurobindo, du psychique, de descendre de plus en plus profondément jusqu'à la source de l'aspiration. Il ajoute par ailleurs que le japa a tendance a créer une agitation dans le mental ou dans le cœur et que et que cela nuit à la descente du silence et de la paix.

Voici deux Lettres sur le Yoga qui vont dans ce sens :

"La sâdhanâ de notre yoga ne procède par aucun enseignement mental fixe ni par des formes prescrites de méditation, mantra ou autres, mais par aspiration, par concentration à l'intérieur ou vers le haut, par l'ouverture à l'Influence, au Pouvoir divin au-dessus de nous et à son action, à la Présence divine dans le cœur, et par le rejet de tout ce qui leur est étranger."

*

"En règle générale, le seul mantra utilisé dans notre sâdhanâ est le nom de la Mère ou mon nom et celui de la Mère. La concentration dans le cœur et la concentration dans la tête peuvent être utilisées toutes les deux : chacune a un effet particulier. La première ouvre l'être psychique et apporte la bhakti, l'amour et l'union avec la Mère, sa présence dans le cœur et l'action de sa Force dans la nature. La seconde ouvre le mental à la réalisation du moi, à la conscience de ce qui est au-dessus du mental, à l'ascension de la conscience hors du corps et à la descente de la conscience supérieure dans le corps."

Mais il existe aussi d'autres lettres dans lesquelles Sri Aurobindo explique la pratique du mantra et du japa.

Cette vidéo de Sraddhalu m'a un peu secoué dans la mesure où j'ai souvent parlé du mantra et du japa, et que je le pratique moi-même, quoique de façon moins intensive et moins régulière que par le passé. Si je l'ai fait, c'est que je prétends qu'il est possible, avec ce japa des prières de la conscience des cellules, d'expérimenter des choses intéressantes. Pour être honnête, je ne comprends même pas très bien qu'il puisse ne rien se passer avec la prière d'invocation, la prières pour que le Divin prenne possession des cellules, du cerveau, des nerfs, etc. ou la prière de la manifestation divine... Ce sont des prières magnifiques.

L'exemple de mon amie Sandrine l'a d'ailleurs abondamment confirmé. C'est avec une pratique intensive du japa de ces prières qu'elle a obtenu son "étrange et formidable guérison" du sang, et ce alors qu'elle n'avait ni la réalisation des plans supérieurs, ni la connexion avec le psychique. Elle n'a en rien respecté l'ordre protocolaire : d'abord connecter la Conscience suprême, ensuite faire descendre cette Conscience dans son mental et son vital, et ensuite seulement, quand le processus de transformation du corps commence, le japa deviendrait utile. 

Clarifions encore les choses en établissant la différence entre la pratique du mantra om namo bhagavaté et la pratique du japa des  prières de la conscience des cellules et qui est peut-être différente des autres japas traditionnels en Inde. L'hypothèse est en tout cas permise.

Je note au passage que Mère a parlé dans d'autres Agendas du pouvoir du son du mantra et que, bien avant le début de la transformation du corps, elle utilisait déjà depuis 40 ans cette phrase qui revient plusieurs fois dans son japa des prières des cellules, "Seigneur, Dieu de bonté et de miséricorde" et qu'il s'agissait d'un mantra de l’ascension.

Deux aspects de la vidéo m'ont laissé perplexe. Pour commencer à propos de cette phrase, "s’il en était arrivé là où nous en sommes, Sraddhalu stipule que ce "nous" parle de Mère exclusivement et cela me paraît être une interprétation un peu facile. Et puis le fait que Sraddhalu a trouvé le dernier paragraphe sans importance. Est-ce parce que Mère y décrit les effets positifs du japa ?   

Ceci dit finalement, en déconseillant la pratique du japa, Sraddhalu nous "simplifie" la vie. La pratique du japa est une expérience et la non-pratique est aussi une expérience. Au final, la question n'est peut-être pas tant ce que nous faisons qui importe mais la façon dont nous le pratiquons.  

🌸

La deuxième partie de la vidéo est tout aussi intéressante. Sraddhalu revient sur la nécessité de protéger la pratique et de défendre ACTIVEMENT la vérité, SANS COMPROMIS. Il termine par un vibrant plaidoyer pour la protection des enfants et par ces deux prières de Mère du 6 janvier 1952 et du 24 novembre 1952 :

"Fais de nous les guerriers héroïques que nous aspirons à devenir, pour livrer avec succès la grande bataille de l'avenir qui doit naître contre le passé qui veut durer ; afin que les choses nouvelles puissent se manifester et que nous soyons prêts à les recevoir."

"Pour suivre Sri Aurobindo dans la grande aventure de son Yoga intégral, il fallait être un guerrier ; mais maintenant qu'il nous a quittés physiquement il faut être un héros." 

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